Les 27 sont divisés sur le rythme de sortie des énergies fossiles et alignés sur Washington pour l’aide à l’adaptation des pays vulnérables. D’où une faible ambition pour le sommet climatique de Dubaï.
Après des semaines de négociations, les 27 ministres chargés de l’environnement se sont accordés sur les positions que devra tenir l’Union européenne (UE) lors de la COP 28 de Dubaï. Le deal a finalement été conclu le 17 octobre, non sans d’ultimes tractations.
Certains objectifs qui seront poursuivis par l’UE ne seront pas pour déplaire à la présidence émiratie du sommet onusien. Le Conseil européen milite pour un triplement de la capacité de production d’énergie à partir de sources renouvelables et un doublement du taux d’amélioration de l’efficacité énergétique d’ici à 2030. Deux des buts que Sultan Al-Jaber, le président de la COP 28, souhaite voir inscrits dans le communiqué final.
Lente sortie des fossiles
Plus dissensuelle est la sortie des énergies fossiles. Le Conseil propose d’éliminer progressivement à l’échelle mondiale les combustibles fossiles sans dispositif d’atténuation. Le pic de consommation devant intervenir d’ici à 2030. Pas inintéressant à un détail près : le dispositif d’atténuation.
Cela signifie que des centrales électriques, des raffineries, des cimenteries carburant au charbon ou aux hydrocarbures pourront continuer à tourner si elles sont dûment équipées d’un système de captage de gaz carbonique. Pas le meilleur moyen d’accélérer la transition énergétique. On ne pourra pas forcément investir dans le captage-stockage et les énergies décarbonées en même temps !
Captage ou pas captage ?
Sur ce sujet, l’Europe était très partagée. L’Allemagne, le Danemark, la France, l’Irlande, les Pays-Bas, la Slovénie souhaitaient une sortie pure et simple des énergies fossiles. Un autre bloc, essentiellement composé de la Hongrie, de l’Italie, de Malte, de la Pologne, de la République Tchèque et de la Slovaquie, proposait de recourir aux systèmes de captage pour permettre aux industries peinant à se passer de fossiles de réduire leurs émissions. Ce dernier l’a finalement emporté.
Officiellement, l’UE veut mettre fin au subventionnement des énergies fossiles. Mais selon qu’ils en consomment plus ou moins, les Etats membres n’ont pas la même appréciation du sujet que leur voisin. D’où la formulation alambiquée de la position communautaire : « suppression progressive, dès que possible, des subventions aux combustibles fossiles qui ne ciblent pas la précarité énergétique ou la transition juste. »
Dit autrement, les pays qui craignent qu’une explosion sociale succède à un relèvement des prix des carburants ou des combustibles fossiles pourront continuer à les subventionner. Le spectre des Gilets jaunes bouge encore.
Torpillage du fonds de Sharm-el-Sheikh
Sur l’adaptation, rien que de vagues propos qui n’engagent à rien : « il est important que toutes les parties redoublent d’efforts pour intégrer l’adaptation et la résilience face au changement climatique dans les politiques et programmes existants dans tous les secteurs concernés. »
L’Europe se place dans les pas des Etats-Unis pour ce qui concerne le dossier, très sensible, des « pertes et préjudices ». L’an passé, la COP 27 avait créé, sous la pression du G77, un fonds dédié au financement de l’adaptation pour les pays vulnérables touchés par les effets d’un réchauffement causé par les pays les plus industrialisés. Le gouvernement américain propose que ces fonds ne soient pas gérés par le fonds créé à Sharm-el-Sheikh, mais par la Banque mondiale.
L’idée fait bondir la plupart des négociateurs des pays du Sud. Pour eux, l’institution onusienne est lente, inefficace et surtout sous la coupe de Washington. Conscients de la sensibilité du sujet, les Européens ne recommandent pas (ouvertement) de confier l’argent de l’aide à l’adaptation à la banque dirigée par Ajay Banga. Hypocrites, ils « notent les possibilités qu’offrent les banques multilatérales de développement et les institutions financières internationales. » L’Europe peinera à convaincre les pays du Grand Sud de son désintéressement.